En entreprise, les gestionnaires sont constamment amenés à négocier, que ça ait trait aux conventions collectives, aux contrats d’embauche, aux cessations du lien d’emploi, etc. Ainsi, la formule conventionnelle de négociation se base sur une relation de force, de compétition, de soumission, et sur une démarche qui tend davantage vers l’antagonisme que sur la coopération. En effet, chaque partie défend sa position, et présente à l’autre des arguments stratégiques pour tenter l’y faire prendre part. En campant sur leurs positions, des conflits peuvent naître entre les deux parties, et les ententes négociées dans de telles conditions sont souvent chancelantes.
C’est là qu’intervient la négociation raisonnée.
Élaborée au début du 20ème siècle par la conseillère en management américaine Mary Parker Follet, cette méthode de négociation part du principe que les comportements des personnes s’expliquent par les besoins et les intérêts qui les sous-tendent, en tenant compte du fait que ceux-ci peuvent être instinctifs ou inconscients.
Pour réussir une négociation, il conviendrait dès lors de sortir du rapport de force caractéristique de ce type d’échange, pour chercher à comprendre les véritables intérêts des parties.
Un exemple habituellement utilisé pour illustrer le principe de négociation raisonnée est celui de l’orange. Trois personnes souhaitent partager une orange, mais ne parviennent pas à trouver un accord. C’est en les interrogeant qu’on découvre que leurs motivations divergent : l’une souhaite le jus, l’autre souhaite l’écorce, et la dernière souhaite la pulpe. Leurs besoins identifiés, l’accord semble immédiatement plus facile à trouver.
La négociation raisonnée aide à dégager des solutions créatives sur base de la prise en compte des besoins et intérêts de chacune des parties. Ceux-ci peuvent toutefois sembler difficiles à identifier et à appréhender.
Selon l’approche de la négociation raisonnée, les intérêts d’une personne sont de 4 natures :
La compréhension des motivations de chaque partie est essentielle. Elle permettra d’estimer si certains points de vue pourront éventuellement se rejoindre, et changera la dynamique de la négociation en passant de l’affrontement à la collaboration.
La négociation raisonnée passe par diverses étapes.
En premier lieu et comme énoncé ci-dessus, le négociateur raisonné devra prendre le temps de déterminer et d’analyser les intérêts et les besoins de chaque partie. Comme l’illustrent les différents types d’intérêts évoqués dans la section précédente, ces besoins ne seront pas uniquement d’ordre économique. Le volet relationnel devra également être analysé, une partie pouvant décider de faire des concessions pour maintenir une bonne relation avec l’autre partie.
La seconde étape consiste à examiner toutes les options possibles, et ce même si certaines d’entre elles peuvent sembler insolites. La pratique prouvera au négociateur raisonné que c’est en pensant « out of the box » qu’il parviendra à trouver des solutions judicieuses.
Ensuite, le négociateur devra prendre en compte les questions d’ordre culturel qui pourraient intervenir dans la négociation. Ces questions peuvent aussi bien concerner des jours fériés spécifiques que les rapports hommes-femmes, les différences hiérarchiques, etc. Pour pouvoir appréhender au mieux ces questions, il lui sera nécessaire de bien connaître les parties prenantes.
Enfin, la dernière étape de la négociation raisonnée consiste à réfléchir aux options envisageables (poursuite judiciaire, rupture de contrat, etc.) dans l’éventualité où aucune entente n’est possible, et où la négociation ne parvient pas à solutionner le différend. Si ces options de replis sont avantageuses, les chances que les parties prenantes soient moins rigides pendant la négociation seront plus importantes.
La négociation raisonnée constitue un processus flexible et dynamique. Cependant, elle n’est pas naturelle pour tout un chacun. En effet, l’être humain tend à s’inscrire dans des rapports de force de façon instinctive.
Pour les personnes actives dans les affaires, le défi de la négociation raisonnée consiste à transformer ce trait de caractère en leadership positif, qui vise à combler les besoins et les intérêts des employés, pour faire de chacun d’entre eux une force de l’entreprise.
C’est pourquoi la formation en négociation raisonnée s’avère importante pour les gestionnaires, afin qu’ils puissent procéder pas à pas dans leur apprentissage de cette soft skill, et qu’ils commencent à l’utiliser dans leurs tâches quotidiennes.
Envie d'en savoir plus ? En vidéo, notre formateur Jean-Yves Girin vous invite à découvrir l'art de la négociation raisonnée...
Découvrez sa formation, « Les fondamentaux de la négociation raisonnée » !
Source : « La négociation raisonnée, une méthode éprouvée » - Miville Tremblay, Article écrit en collaboration avec Emmanuelle Gril dans Gestion 2020/1 (Vol. 45), pages 36 à 39.